VI.2- Fonctionnement des synapses à transmission chimique.
VI.2.1- Découverte des neurotransmetteurs : expérience d’Otto Loewi (1921).
Le dispositif suivant présente une variante des expériences originales de Loewi permettant l’enregistrement simultané de l’activité de deux cœurs isolés.
Interprétation.
La stimulation du pneumogastrique (nerf vague ou X) provoque l’arrêt du cœur A suivi 5 secondes après de l’arrêt du cœur B.
Loewi conclut que la stimulation du pneumogastrique provoque la libération d’une substance qui agit sur le cœur A. cette substance circule dans le liquide physiologique et a sur le cœur B le même effet que la stimulation du nerf vague.
Il nomme substance vagale cette substance libérée par le nerf vague. Plus tard il l’identifie comme étant l’acétylcholine (Loewi, 1925).
Ces travaux ont conduit à l’établissement de la théorie neuro-hormonale qui stipule qu’il existe une médiation chimique entre les nerfs et les effecteurs.
VI.2.2 Mécanisme de la transmission synaptique.
Au niveau des synapses, le message nerveux est transmis d’un neurone pré-synaptique à des neurones post-synaptiques ou à des cellules des organes effecteurs.
Le message nerveux afférent provoque une entrée des ions \(C{a^{ + + }}\) suivie de la migration puis de l’exocytose des vésicules synaptiques au niveau de la membrane pré-synaptique. Les neurotransmetteurs libérés diffusent dans l’espace ou fente synaptique vers la membrane post-synaptique qui contient des protéines réceptrices des molécules de neurotransmetteurs.
La fixation des neurotransmetteurs sur les récepteurs membranaires provoque une modification plus ou moins importante et non propagée de la polarisation électrique de cette membrane appelée potentiel post-synaptique (PPS). La valeur du PPS dépend du nombre de récepteurs activés. Il peut à son tour déclencher un potentiel d’action post-synaptique.
Très rapidement, les molécules de neurotransmetteurs se détachent des récepteurs membranaires entraînant un retour au potentiel de membrane initial. Elles sont ensuite soit inactivées par des enzymes spécifiques présentes dans l’espace synaptique ; soit recapturées par le neurone pré-synaptique c'est-à-dire celui qui les a émis, soit catabolisées.
NB : le message nerveux pré-synaptique codé en modulation de fréquence de potentiels d’action est converti, dans l’espace synaptique, en message chimique codé en concentration de neurotransmetteurs.
VI.2.3- Synapses chimiques excitatrices et inhibitrices.
VI.2.3.1 Expérience.
Une dissection du système nerveux de la blatte montre que les cerques abdominaux (récepteurs sensoriels) sont connectés à un neurone géant dont le corps cellulaire est localisé dans le sixième ganglion abdominal. Le message sensitif émis par les récepteurs situés à la base des soies sensorielles arrive au sixième ganglion par deux nerfs :
• le nerf cercal dont les fibres nerveuses sont reliées directement au neurone géant ;
• le nerf paracercal dont les fibres nerveuses sont reliées indirectement au neurone géant (par l’intermédiaire d’interneurones)
Toutes les synapses chimiques ont le même principe de fonctionnement mais le neurotransmetteur libéré n’a pas les mêmes effets sur l’état électrique de la membrane post-synaptique.
Dans une synapse excitatrice, la modification du potentiel de repos suite à la fixation du neurotransmetteur est une dépolarisation locale de faible amplitude appelée potentiel post-synaptique excitateur (PPSE).
Exemple de neurotransmetteur excitateur : l’acétylcholine, l’adrénaline, le glutamate, …
Dans le cas d’une synapse inhibitrice, la modification du potentiel de repos est une hyperpolarisation locale de faible amplitude appelée potentiel post-synaptique inhibiteur (PPSI).
VI.3 Fonctionnement des synapses à transmission électrique.
Le fonctionnement est assez simple car les neurotransmetteurs n’interviennent pas. Le transfert d’ions passe de la cellule pré-synaptique à la cellule post-synaptique par l’intermédiaire des canaux qui traversent l’espace synaptique et réunissent le cytoplasme des deux cellules. Le message nerveux est donc généré au niveau de la membrane post-synaptique sans délai synaptique.
VI.4 Sommations spatiale et temporelle
6.4.1- Sommation temporelle.
VI.4.1.1 Expérience.
On stimule une seule soie de l’un des cerques d’une blatte. Le neurone sensitif situé à la base de la soie émet alors un message conduit par son axone qui est une fibre du nerf cercal. Un dispositif d’enregistrer l’activité électrique de la fibre excitée et l’état électrique du neurone géant.
VI.4.1.2 Résultat.
On obtient les tracés suivants :
VI.4.1.3 Interprétation et conclusion.
Les stimulations successives et rapprochées portées sur les fibres nerveuses provoquent des dépolarisations de plus en plus croissantes de la membrane du neurone géant. On assiste donc à une somation dans une région du neurone post-synaptique des PPSE arrivant avec quelques millisecondes d’intervalle : on parle d’une somation temporelle des PPSE.
La somation temporelle est due au fonctionnement d’une synapse à forte fréquence.
VI.4.2 Sommation spatiale.
VI.4.2.1 Expérience.
On stimule l’ensemble du nerf cercal, en portant chaque fois, un seul choc électrique d’intensité croissante \({i_1}\), \({i_2}\) et \({i_3}\). Il y a donc un nombre de plus en plus grand de fibres nerveuses excitées qui transmettent chacune simultanément un potentiel d’action. Ainsi, plus le nombre de fibres excitées dans le nerf cercal est grand, plus le nombre de synapse actives au contact du neurone géant et important.
VI.4.2.2 Résultat.
On obtient les tracés suivants :
VI.4.2.3 Interprétation et conclusion.
Un seul potentiel d’action pré-synaptique ne peut pas générer un potentiel d’action post-synaptique.
L’arrivée simultanée de plusieurs PPSE en divers points de la cellule post-synaptique provoque une dépolarisation dont l’amplitude dépend du nombre de PPSE. On assiste donc à une sommation à un instant donné de tous les PPSE qui arrivent sur le neurone post-synaptique : on parle d’une sommation spatiale des PPSE.
La sommation spatiale est due au fonctionnement simultané de plusieurs synapses. C’est la somme algébrique de nombreux PPSE et PPSI due à l’activité simultanée des synapses.
Le plus souvent, les deux types de sommations interviennent : c’est la sommation spatio-temporelle. C’est le cas lorsque plusieurs fibres pré-synaptiques sont activées et conduisent chacune un train de potentiels d’action.
IV.4.3 Intégration des messages par les neurones.
Un neurone post-synaptique est soumis en même temps à l’influence des synapses excitatrices et à celle des synapses inhibitrices. Une sommation algébrique des PPSE et PPSI conditionne l’émission des potentiels d’action par le neurone post-synaptique.
Si le résultat est une dépolarisation suffisante, les potentiels d’action sont émis par les cellules post-synaptiques à une fréquence d’autant plus élevée que la dépolarisation est importante.
Si le résultat est par contre une hyperpolarisation, la cellule post-synaptique reste au repos.
Cette fonction intégratrice joue un rôle essentiel dans le traitement des messages qui passe dans les centres nerveux.
L’intégration neuronale est le processus par lequel un neurone recevant un ensemble de messages de nature différente élabore des messages originaux à l’origine d’une réponse appropriée.
VI.5 Effets de certaines substances sur la transmission synaptique.
De nombreuses substances de dopage (amphétamines) et de dopage (cocaïne, nicotine, morphine…) peuvent modifier le fonctionnement de la synapse et par là le comportement d’un individu : ce sont des substances psychotropes
VI.5.1 Les substances agissant sur la libération des neurotransmetteurs.
Lors du dopage, les amphétamines agissent en augmentant la libération des neurotransmetteurs du même groupe que l’adrénaline (dopamine par exemple). Ces neurotransmetteurs présents en plus grande quantité dans la fente synaptique provoquent une excitation inhabituelle.
VI.5.2- Les substances agissant sur la fixation des neuromédiateurs sur les récepteurs de la membrane post-synaptique.
Chaque récepteur est spécifique d’un neurotransmetteur donné, mais une molécule de forme très proche peut tromper le récepteur et se fixer à lui. Selon le cas, elle peut l’exciter ou l’inhiber.
VI.5.2.1 Le mimétisme.
Les drogues opiacées (opium, morphine, héroïne) sont de puissants analgésiques qui, grâce à une conformation spatiale très proche de celle du neurotransmetteur comme l’enképhaline se fixe sur les mêmes récepteurs et produisent les effets identiques : diminuer la sensation douloureuse.
NB : La morphine est un dérivé de l’opium extrait du pavot.
VI.5.2.2 Le blocage.
Le curare est une substance paralysante (utilisée par les indiens pour empoisonner leurs flèches). On sait actuellement que le curare entre en compétition avec l’acétylcholine au niveau des récepteurs post-synaptiques qui, lorsqu’ils sont liés au curare, ne sont plus disponibles pour l’acétylcholine, d’où la paralysie.
L’atropine, autre extrait paralysant d’origine végétale, a le même mode d’action que le curare.
VI.5.3- Les substances agissant sur l’inactivation du neurotransmetteur.
Certains insecticides organochlorés bloquent l’action de la cholinestérase, ce qui augmente le fonctionnement de la synapse. Leur absorption accidentelle peut paralyser la fonction respiratoire.
VI.5.4- Les substances agissant sur la recapture des neurotransmetteurs.
La cocaïne bloque la récupération de la dopamine et de la noradrénaline par le neurone présynaptique d’où une excitation anormalement prolongée de la cellule post-synaptique.
Bilan : schéma de synthèse illustrant les perturbations de la neurotransmission et ses conséquences.