Texte
« Quiconque veut vraiment devenir philosophe devra "une fois dans sa vie“ se replier sur soi-même et, au-dedans de soi, tenter de renverser toutes les sciences admises jusqu'ici et tenter de les reconstruire.
La philosophie - la sagesse - est en quelque sorte une affaire personnelle du philosophe. Elle doit se est constituer en tant que sienne, être sa sagesse, son savoir qui, bien qu’il rende vers l’universel, soit acquis par lui et qu'il doit pouvoir justifier dès l'origine et à chacune de ses étapes, en s'appuyant sur ses intuitions absolues. Du moment que j'ai pris la décision de tendre vers cette fin, décision qui seule peut m'amener à la vie et au développement philosophique, j'ai donc par là même fait vœu de pauvreté en matière de connaissances »

HUSSERL, Méditations cartésienne: (1929), and. G. Peiffer et E. Levinas, Ed.Vrin, 1947, p. 15

I. Définition des concepts (1 ptx3 = 3pts)

Universel. Par ce concept, il faut entendre ce qui : 1pt
• a l’assentiment du plus grand nombre ;
• embrasse la totalité des avis ;
• concerne le plus grand nombre‘, qui leur est commun ;
• affecte quelque chose dans son ensemble ;
• dont la portée est générale, qui s’étend à tout, à tous et partout ;
• est commun à tous les hommes i;
• peut s’appliquer à toutes et à tous et qui peut être reconnu par tout le monde.
Sciences admises. Il faut saisir cette expression comme : 1 pt
• L’ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits, d’objets ou de phénomènes obéissant à des lois et/ou vérifiés par les méthodes expérimentales ;
• L’ensemble des connaissances humaines qui se rapportent à des faits obéissant à des lois objectives (ou considérés comme tel) et dont la mise au point exige systématisation et méthode ;
• les sciences ou connaissances bâties soit sur‘ des principes démontrables, soit sur des raisonnements vérifiés par l’expérimentation ;
• les opinions reçus ;
• les savoirs acquis ;
• les connaissances premières ;
• les savoirs constitués.
Développement philosophique.
Ce concept doit être saisi comme étant : 1 pt
• le déploiement permanent de la pensée libre, personnelle et critique s’orientant sur les questions existentielles ;
• l’émergence, l'évolution de la philosophie.

II. RÉPONSES AUX QUESTIONS (6pts)

1ere question : thème et problème philosophique (2pts)
Thème: Le philosophe / le dialecticien /le penseur
Problème philosophique i
Edmund Husserl, dans l’extrait proposé, traite du problème de la caractérisation du philosophe /de la condition pour être philosophe.

Thèse :
Dans cet extrait de l’œuvre Méditations cartésiennes considérée à l’époque comme le best-seller de sa production philosophique, Edmund Husserl soutient la thèse selon laquelle le philosophe est le pèlerin de la vérité! le penseur de la pensée/ celui qui remet en question de manière permanente les savons acquis/ celui qui est en route. '

Structure logique du texte
Le philosophe et logicien Allemand adopte ici une démarche trilogique. Il commence par nous entretenir sur la condition à remplir pour être/devenir philosophe. Il la résume à une remise en question du « déjà là » pour l’avènement du « pas encore ». Mieux d’une introspection qui amène à remettre en question les connaissances premières. Par la suite, il présente la philosophie comme le socle, le terrain de prédication du philosophe. Il achève son analyse par l’idée que « le connais-toi toi-même », l’humilité est à considérer comme la condition sine qua non du développement philosophique. Autrement dit, le philosophe est celui qui, conscient de son ignorance, recherche de façon inlassable le savoir.

III- ESSAI PERSONNEL (09 pts)

En te fondant sur ta culture philosophique, et dans le respect des règles de la logique, est-il légitime de penser que la philosophie est une vaine spéculation?

A) ANALYSE ET COMPREHENSION DU SUJET

1- Repérage et explications des concepts clés

Philosophie
• amour de la sagesse ;
• recherche permanente du savoir ;
• réflexion critique et personnelle sur les situations existentielles;
• débat contradictoire ;
• débat sur l'absolu;
• quête du savoir ;
• activité réflexive portant sur 1e comment et le pourquoi des choses ;
• pensée de la pensée ;
• réflexion rationnelle et critique ayant pour objet et pour finalité la recherche des solutions aux problèmes existentiels ;
• recherche inlassable de la vérité.

Vaine spéculation.
• pure réflexion;
• théorie sans importance;
• théorie sans impact sur le réel, la vie;
• pensée sans fondement ;
• pensée n’ayant aucun effet notoire sur la vie.

2- Reformulation du sujet

• Est-il légitime d’ignorer la philosophie dans la recherche du bien-vivre?
• Est-il légitime de faire fi de la philosophie dans l’optique d’un vivre ensemble ?
• La philosophie n’a-t-elle aucune utilité pratique?
• La philosophie est -elle un discours éthéré?

3- Présuppose

La philosophie est ‘un simple art oratoire, une pure spéculation, sans aucune incidence dans l’amélioration de la qualité de la vie. Il s’agit là du point de vue de l’opinion commune.

4- Thèse opposée au présupposé

La philosophie est le socle du savoir vivre ensemble. Elle est un impératif catégorique pour mener une existence sereine. Autrement dit, la philosophie a une contribution remarquable dans l'amélioration de la qualité de la vie. Il s’agit cette fois là de la critique- de l’opinion commune.

5- Position du problème philosophie

• valeur de la philosophie dans la vie ;
• impact de la philosophie dans 1a vie de l’homme ;
• capacité de la philosophie à améliorer l’humanité en l’homme.

6 Problématique

Si vivre, c’est lutter, transcender les situations existentielles, agir de façon consciente et rationnelle, est-il légitime d’exclure, d’ignorer, de considérer la philosophie comme une vaine spéculation?
Penser que la philosophie est un simple bavardage, n’est-ce pas perdre de vue ses apports incommensurables dans l’amélioration de l’existence humaine ?

ESSAI DE PLAN

A. Thèse: On pourrait considérer la philosophie comme une vaine spéculation

Argument 1 : La philosophie est une méditation abstraite qui éloigne l’homme de la vie.
Pour l’homme de la rue, la philosophie est aux antipodes de la réalité existentielle des hommes, de la vie. Bien plus, le vulgaire pense que la philosophie détourne l’homme de la vie pratique et par conséquent n’apporte aucune contribution au développement d’un pays.
Cf. Jean Jacques Rousseau : « L’état de réflexe est un état contre-nature et l’homme qui médite est un animal dépravé ».
Cf. Victor Hugo : « Il vient une heure où protester ne suffit plus : après la philosophie, il faut l’action.»
Illustration : Ce mépris de la philosophie se matérialise dans le comportement du vulgaire à travers les formules : « Mangeons, buvons car demain nous mourrons», « vivre d’abord, philosopher ensuite ».
A défaut d’être ignorée, la philosophie est reléguée au second plan. Et pour cause, pour le populacier, le plébéien, la philosophie à travers ses méditations semble mépriser le « monde sensible » au profit du « monde intelligible».

Argument 2 : La théoricité avérée de la philosophie la place hors-jeu dans le processus de l’amélioration de la qualité de la vie.
Le caractère essentiellement théorique de la philosophie justifie son rejet, sa mise à l’écart par le scientifique.
S’inspirant des progrès scientifiques et techniques réalisés au 19e siècle, le commun des mortels est convaincu que philosopher est une perte de temps.
Cf. Karl Marx : « Jusqu’ici, les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses manières. Ce qui importe maintenant, c'est de le transformer».
Cf. Paul Valery : « Ce qu’on peut reprocher à la philosophie c’est qu’elle ne sert à rien.».
Cf. Aristote pour qui « La philosophie est une science désintéressée».
Cf. Clément Rosset : «Il ne faut pas compter sur le philosophe pour trouver des raisons de vivre. »
Cf. M. Duverger : «La philosophie doit être remplacée par la science».
S’appuyant sur ces auteurs, le vulgaire fonde son espoir sur la science qui libère l’homme en lui donnant des instruments pour l'action. La philosophie dès lors est disqualifiée dans la recherche d’un bien-vivre, du bien-être.

Argument 3 : Le caractère subversif et iconoclaste de la philosophie.
L'esprit critique, essence de la philosophie est une sérieuse menace pour l'homme, pour son bonheur, ses rapports avec ses semblables et le pouvoir politique.
Cf. Montesquieu : «La monarchie dégénère ordinairement dans le despotisme d’un seul; l’aristocratie dans le despotisme de plusieurs ; la démocratie dans le despotisme du peuple. »
Cf. Albert Camus : «Lorsque nous serons tous coupables, ce sera la démocratie véritable.»
Cf. Ebénézer NJOH MOUELLE : « Le philosophe est celui qui ne dort jamais».
Cf. Clémenceau : « Si j’avais une province française à punir, je la ferais gouverner par un philosophe.»
La dimension subversive de la philosophie est une sérieuse menace pour la paix et le vivre-ensemble.
Illustration : L’attitude de rébellion de Socrate dans la cité athénienne. Attitude qui lui a valu un procès, une condamnation à mort.

Argument 4 : La philosophie apparaît comme un simple art oratoire, une gesticulation gratuite.
Il s’agit d’un simple arrangement savant des mots, une simple rhétorique inapte à solutionner les problèmes des hommes et par conséquent, à améliorer la qualité de leur existence.
Cf . Paul Valery : «La philosophie est un pur jeu de mots.»

Cf . Sénèque : « La philosophie ‘doit apprendre à vivre et non à faire des discours. »

Argument 5 :L’athéisme de la philosophie comme une sérieuse menace pour la foi de l’homme.
L’athéisme de 1a philosophie est une source perturbatrice de l’équilibre de l’homme.
Cf. Nietzsche: « Dieu est mort. Vive le surhomme» ;
J.P. Sartre : « Il n’y a pas de nature humaine puisqu’il n’y a pas de Dieu pour la concevoir». .

Argument 6 : le comportement bizarre et insolite du philosophe réduit la philosophie à une pure évasion du monde.
Cf. Àristophane : « Le philosophe est un sujet qui se balade en débitant toutes sortes de sottises. »
Illustration : le comportement marginal de Diogène se promenant en journée avec une torche l’allumée cherchant l’homme et Thalès qui scrutant les astres et se retrouva finalement dans un puits ont fini par faire dire à Aristophane que : « Le philosophe est le prince des nuées.»

Transition
B. Antithèse : L’incontournabilité de la philosophie dans la vie, dans l’existence humaine.

Argument 1 : La théorie philosophique au service de l’action. l
La philosophie est cette théorie qui précède l’action pour l’orienter et qui vient après elle pour l'évaluer.
Cf. Kwamé Nkrumah : «La théorie sans pratique est vide et la pratique sans théorie est aveugle.»

Argument 2 : La philosophie est incontournable dans la vie en ce sens qu’elle permet à l’homme d'acquérir le savoir, le savoir vrai en ‘reculant le plus loin possible les barrières de l’ignorance, de la superstition, des croyances.
Ce qui participera à son bien-vivre et à l’harmonie de ses rapports avec ses semblables.
Cf. Alain : « Savoir, c’est savoir qu’on sait ». Le savoir que la philosophie nous permet d’acquérir devient un pouvoir qui nous permet de faire face aux situations de la vie. Dès lors, la philosophie devient incontournable dans la vie.
Cf. Kwamé Nkrumah : « Les philosophies se présentent .,. non comme les systèmes éthérés, mais comme des armes intellectuelles à usage social. »
Cf. Vladimir Jankélevitch: « Philosopher revient à ceci : se comporter à l’égard de l’univers comme si rien n’allait de soi. »

Argument 3 : La philosophie en cultivant en chacun de nous l’humilité participe à la cohésion sociale.
Elle devient le ciment de la vie sociale.
Cf. Socrate : «Je ne sais qu’une chose, c’est que je ne sais rien ».
Cf. Karl Jaspers : «' L’essence de la philosophie c’est la recherche d'e la vérité, non sa possession ».

Illustration : Le désir de quelques élèves de former un groupe d’étude est révélateur des difficultés éprouvées par chacun et l’espoir de les transcender par les contributions des autres. Un tel échange participe à rendre les uns et les autres heureux mais également à créer 1a convivialité entre eux.

Argument 4 : La philosophie parce qu’elle travaille à la libération et à la responsabilité de l’homme est incontournable dans la recherche du bonheur.
Cf. Aristote : « La philosophie est ce sans quoi il est impossible-de vivre. »
Cf. Alain : « Rien ne m’engage, rien ne me force. Je pense donc je suis ».
Comme on le perçoit, la philosophie travaille à rendre l’homme autonome.
Ce dernier devient Facteur de son destin et un maillon essentiel du développement de sa cité.

Illustration : La dialectique ascendante et descendante dans 1e mythe de la caverne de Platon libère l’homme et le rend utile aux siens.

Argument 5 : La philosophie comme moyen de domestiquer, canaliser nos désirs et passions est par conséquent source de bonheur.
Cf. Ebénézer NI OH MOUÈLLE : «La marque particulière du sous-développement, c’est la misère objective ». ' i
Cf. René Descartes : « C’est proprement avoir les yeux fermés sans tâcher jamais de les ouvrir que de vivre sans philosopher ».
Cf. Cicéron : «Vivre, c’ est penser »

Illustration : La programmation parle MÏNESEC des cours de philosophie en classe de 2nde est une réponse aux passions, aux replis identitaires observés dans notre société aujourd’hui. De ce fait, l’enseignement philosophique doit installer dans les esprits de nos jeunes le désir du vivre-ensemble et du bien-vivre ensemble.

Argument 6 : La philosophie est incontournable dans la vie parce qu’elle est promotrice des valeurs sociales, hominisantes.
Cf. René Descartes : « Chaque nation est d’autant plus civilisée et polie que les hommes y philosophent mieux. »

Transition
Synthèse
La philosophie a été, à travers l’histoire, le socle du développement. Elle doit demeurer cette boussole en se focalisant sur tout ce qui touche à la bi-dimensionnalité de l’homme. Mieux la philosophie doit s’élever dans la pensée pour contempler les idées puis, redescendre dans la caverne pour y introduire la vérité dans le but de la transformer.

Présentation : (2pts)
1 pt pour le respect de la structure logique d’une dissertation
1 pt pour l’allure générale de la copie